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Le troisième grand chelem
de la nippo-haïtienne Naomi Osaka

Hugues Saint-Fort

Comment Naomi Osaka a-t-elle pu récupérer psychologiquement après la piteuse première manche qu’elle a jouée face à la Biélorusse Victoria Azarenka et perdu 1-6, remporter dans des conditions difficiles la seconde manche 6-3, puis une troisième et dernière manche 6-3 chargée de suspense, assurant ainsi son deuxième triomphe à l’US Open de tennis? Pour une fois, je n’étais pas présent à Flushing Meadow, COVID-19 oblige, mais j’ai pu suivre cette finale à la télé, comme des millions de fous de tennis.

J’ai pu ainsi me rendre compte des progrès immenses réalisés par la nippo-haïtienne spécialement sur le plan psychologique. Car cette victoire a été un modèle de solidité mentale de la part de Naomi Osaka qui s’est révélée capable d’effacer rapidement les erreurs les plus frustrantes commises au cours d’un jeu précédent pour se concentrer et refaire le chemin perdu. Elle ne possédait pas cette capacité auparavant et pouvait se laisser aller et perdre ainsi un match qui pouvait sembler à sa portée. Face à Victoria Azarenka qui est une accrocheuse de tout premier plan, Osaka a joué et gagné ce match beaucoup plus par sa capacité à se concentrer dans les moments difficiles que par la brillance de ses coups. Mais le tennis, c’est aussi cela.

Tout s’est joué dans la seconde manche. Ayant perdu 1-6 la première manche, Osaka perd son service et est mené 0-2 au début de la seconde manche. Elle fait montre alors d’une ténacité remarquable, commença à bouger plus adroitement sur le court et reprend son service pour mener 4-3. Elle finit par gagner cette manche 6-3, réduisant le total de ses fautes non provoquées qui passèrent de 13 dans la première manche à seulement 5 dans cette seconde manche, pendant que ses coups gagnants s’élevaient à 14.

La troisième manche a été remplie de suspense. Les échanges se révélèrent d’une brutalité et d’une rapidité presque masculine et Osaka semblait contrôler le jeu. Mais, Azarenka prit le dessus sur le service de la nippo-haïtienne menée 0-40. Pourtant, Osaka réussit à remonter, égalisa à 40 partout, remporta le jeu et mena 4-1. Elle dispose alors de deux chances pour mener 5-1 avec son service à suivre. Au lieu de cela, elle perd son service, donnant ainsi à Azarenka la possibilité de reprendre son service. Mais, c’était compter sans la ténacité d’Osaka qui reprit le service de la Biélorusse pour mener 5-3 avec son service à suivre. Cette fois-ci, elle ne laissa pas passer sa chance et remporta le jeu et le match.

C’est une toute nouvelle Naomi Osaka qui s’est révélée au cours de ce tournoi majeur, avec une nouvelle coupe de cheveux, un nouveau petit ami, un rappeur noir américain, et surtout un engagement social qu’elle est la seule à afficher dans le monde du tennis américain aussi bien masculin que féminin. En effet, elle a pris le soin de faire inscrire les noms de tous les Afro-américains/américaines qui ont été victimes des violences policières dans les diverses villes des Etats-Unis au cours des dernières années. Elle se met ainsi au premier plan des défenseurs du célèbre slogan qui a fait le tour du monde Black Lives Matter (Les vies des Noirs comptent). Nous sommes loin maintenant de l’adolescente timide et réservée qu’on a connue il y a encore deux ans. C’est une battante de la cause noire qui n’hésite pas à prendre la parole pour dénoncer les injustices sociales et raciales qui traversent toute la société américaine. Le tennis mène à tout.

Hugues Saint-Fort
New York, septembre 2020     

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 Viré monté